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Omar Kavota, vice-président et
porte-parole de la société civile du Nord-Kivu. Photo : Fiston Mahamba
|
Chaque matin Omar Kavota , un
jeune défenseur de droits de l’homme vivant en ville de Béni au Nord-Kivu se
voit réveillé par un téléphone qui sonne. Il reconnait. Cela doit être un appel
émanant de ses informateurs soit celui provenant d’un media à la recherche
d’une information.
Par
Fiston Mahamba à Béni, Nord-Kivu
La
trentaine révolue, Omar Kavota est aujourd’hui le vice-président et
porte-parole de la société civile du Nord-Kivu à l’est de la RDC. Il milite
dans cette structure de forces vives depuis plus de dix ans. Ce qui l’a motivé à
entreprendre sa lutte au sein de ce groupe c’est l’injustice qu’il a constaté
dans ce pays de Lumumba.
Passer
en action
La lutte d’Omar ne se limite pas aux
simples dénonciations. Il a pendant plusieurs fois, de concert avec la société
civile initié des actions de grande envergure. Des marches de colère, des
marches pacifiques, des journées ville morte, des sit in qui ont parfois amené
à des actions concrètes de la part des décideurs. Ces mêmes initiatives ont
aidé à stopper les invasions par des groupes rebelles des villes de Béni,
Butembo, Lubero,… pendant la période de la guerre en RDC.
À la veille de la chute de la ville de
Goma entre les mains des rebelles du mouvement du 23 mars, M23 en novembre
2012, Omar Kavota initie l’opération « J’aime
ma patrie » à laquelle s’était joint la société civile. Cette
opération qui ne devrait que couvrir le Nord-Kivu s’étendu sur tout le
territoire de la RDC. Elle va même jusqu'à atteindre la diaspora congolaise. « J’aime
ma patrie » consiste à récolter un dollar américain par congolais
pour barrer la route à la balkanisation
du pays. Une fois récolté, cet argent doit servir au ravitaillement des forces
armées de la RDC, FARDC qui sont au front dans le territoire de Rutsuru contre
les rebelles du M23. « Cet opération
avait connu un engouement de la population congolaise, mais depuis sa clôture
ni Omar Kavota, ni la société civile, personne ne nous a livré une information
sur la somme récoltée et cet argent n’est jamais parvenu aux bénéficiaires qui
sont au front » s’exclame sous anonymat un jeune étudiant de
l’université officielle de Semuliki.
Mais où est passé cet argent? Maitre
Omar Kavota répond « L’argent
récolté reste toujours dans le compte bancaire ouvert pour la cause, toute
personne intéressée peut nous contacter et aura des informations sur ces
fonds ». Il poursuit en disant que cet argent doit atteindre ces
militaires et que les démarches sont en cours avec le commandement de l’armée
pour que cette action soit menée.
Réservoir
et source d’informations
Suite à sa présence dans toutes les contrées
de la région, la société civile est devenue au cours des années une importante
banque des données sur la situation de droits de l’homme. Entretemps Omar
Kavota est passé du poste de président de cette structure en territoire de Béni
à celui de vice-président et porte-parole de la même structure en province du
Nord-Kivu. Dès ce jour, ce dernier est devenu une source d’informations où
viennent puiser les medias tant locaux, nationaux qu’internationaux sans
oublier les ONG intervenant dans ce domaine et plusieurs autres chercheurs.
Omar Kavota exploite cette opportunité. Il profite de la tribune que lui
offrent les médias pour dénoncer. Cela lui crée plus d’amis mais aussi
d’ennemis. Il sera plusieurs fois interpellé et critiqué par ceux qui se
sentaient humilier par ses déclarations. Il ne lâche pas, pour lui la lutte
doit continuer. Le mauvais moment pour lui c’est quand son téléphone portable
n’a plus d’énergie, Béni étant une ville non encore électrifiée.
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Omar Kavota en veste sur la photo reçoit chez
lui le journaliste de la voix de l’Amérique Nicolas Pinault accompagné de Kudra
Maliro, un journaliste reporter de Béni. Photo : Fiston Mahamba |
À
la recherche de l’asile ou de l’électorat ?
Pour ses détracteurs, Omar Kavota milite
et dénonce sans peur avec un double objectif :
1. La recherche de l’asile dans un pays étranger
si une fois des menaces lui provenaient de certains auteurs des crimes qu’il dénonce.
2. D’autres avancent que le deuxième
objectif poursuivi par ce défenseur de droits humains est la recherche d’un électorat.
« A l’instar d’autres membres de la société
civile, qui lors de dernières élections en RDC se sont portés candidats aux législatives,
Omar Kavota veut consolider sa base enfin de postuler aux prochaines élections »,
disent-ils. En réponse à ces allégations, Maitre Omar Kavota dit n’avoir pas en
lui une vision politique. Pour lui si cela était son ambition, il aurait dû
suivre les sciences politiques à l’université à la place du droit qu’il a
embrasser pendant son cursus universitaire en vue de mieux connaitre les droits
et devoirs du citoyen enfin de mieux les défendre.
Même
un trophée
Ses admirateurs se disent indignés du
fait que cet homme qui sacrifie toutes ses activités pour une cause noble ne
soit pas reconnu par les grandes organisations pour pouvoir être primé d’une
reconnaissance internationale. Matthieu Katsuva, un jeune journaliste à la
radio Ngoma Fm, une radio communautaire émettant à Béni dit saluer la bravoure
d’Omar Kavota. Lui résume ses points de vue sur cet homme en ces
termes « Des toutes les façons
le travail que Maitre Omar Kavota réalise pour le peuple congolais en général
et celui du Nord-Kivu en particulier nécessite un encouragement qui pourrait l’élever
au rang de héros vivant de la démocratie dans la région. Pour moi, cet homme mérite
un prix Nobel de la paix à l’instar de grands hommes politiques Africains à qui
l’on décerne parfois ce prix sans grande réalisation de leur part ».
Ce jeune journaliste dit craindre personnellement pour la sécurité de ce
denonciateur, « Omar Kavota mérite
une protection particulière de la part du gouvernement congolais car il n’est
pas vu d’un bon œil par ceux-là dont il dénonce les exactions ».
Matthieu Katsuva chute en adressant un message ambitieux à Omar Kavota « Je demanderai à Maitre Omar Kavota de chaque
fois animer deux conférences par mois à l’endroit du public. Cela permettrai à
l’opinion publique de mieux le découvrir et de lui poser directement les
questions qu’elle se pose sur sa
personne ».
Tout au long de la journée Omar Kavota
partage son temps entre deux activités : rechercher auprès de ses collègues
les informations sur les exactions commises contre les droits humains et en
alerter l’opinion tant locale, nationale qu’internationale. Ainsi se termine
une journée trop surchargée qui parfois chute par la rédaction des rapports de
ses différentes activités. Parfois Omar voit son sommeil interrompu par un coup
de fil qui lui annonce une nouvelle. Ici c’est soit un informateur soit un
journaliste car son numéro de téléphone ne peut jamais manquer dans un carnet
d’adresse de tout journaliste averti qui s’intéresse à la province du Nord-Kivu
voire à la région de Grands-Lacs.
Faut-il
abandonner ?
Tout au début de sa lutte, Omar Kavota
dit qu’il avait voulu pendant plusieurs fois renoncer à son engagement car
« notre travail consiste à dénoncer
toute violation de droit de l’homme, quelque soit son auteur ». Une
mission que d’aucun ne pourrait assumer dans cette partie du pays où ces
violations sont perpétrées de la part de
groupes armés voire du coté gouvernement
congolais comme des attaques ciblées de domiciles, les violences sexuelles
faites à l’endroit de femmes et filles, les détournements de fonds du trésor
public, les enlèvements qui sont devenus une autre arme de guerre des groupes armés
opérant en territoire de Béni comme celui enregistré en date du 19 avril
dernier 2013, où plus de trente civils ont été enlevés à Mamunidioma, localité située à
plus ou moins cinquante kilomètres au nord-est de Béni.
Omar a dû surmonter cette crainte et cela suite aux encouragements de ses
confrères. À cette crainte s’ajoutait les reproches dont il faisait l’objet de
la part des membres de sa famille. Ces derniers se disaient craindre pour leur
sécurité car ils pouvaient faire l’objet des représailles de la part de ceux
qui seront touchés par les dénonciations d’Omar. Malgré cela, ce dernier reste
déterminé. Il a une idée en tête « Si
nous nous taisons, nous participons d’une manière indirecte à ces crimes ».
À cette époque, la société civile n’était
qu’au début de ses actions dans cette partie de l’est du Congo en proie à
l’insécurité et tout son lot. Omar et ses collègues ont contribué à son
élargissement dans tous les coins de la région. L’objectif visé ici étant de
recueillir toutes les informations sur les abus commis contre les droits humains.